Rapport sur le Forum de la Journée internationale de la paix
Paris, Samedi 17 septembre 2016
Le 17 septembre 2016, à l'occasion de la Journée internationale de la paix, les chapitres français de la Fédération pour la paix universelle (FPU) et de la Fédération des femmes pour la paix dans le monde (FFPM) ont organisé un Forum interreligieux sur le thème « Fraternité et spiritualités » à l’Accueil Barouillère à Paris.
Depuis un an et demi, la France traverse une expérience traumatisante avec le terrorisme. Au cours de l’été, la tuerie de Nice et la décapitation du père Hamel dans son église en Normandie ont attisé les tensions et les craintes. Le forum soulevait cette question fondamentale : peut-on aller au-delà de la tolérance et de la coexistence avec l'autre et vivre en frères et sœurs dans une société multireligieuse et multiculturelle ? Les spiritualités apportent une réponse qui est au cœur de leur enseignement : vivre en frères et sœurs est possible si on se connecte avec l’Esprit transcendant qui est à la source de la compassion, de la miséricorde et de l'amour.
Le deuxième d’une série de trois forums prévus en 2016 à Paris*, l'événement visait également à aborder les problèmes sociaux actuels à travers le prisme de la famille, et à porter le thème de la famille au cœur du dialogue interreligieux.
Dans la première séance animée par le vice-président de la FPU-France Patrick Jouan, le premier orateur était Monseigneur Jacques Gaillot, évêque catholique de Partenia. D'un ton doux mais captivant, il saisit l'auditoire en parlant du sens de la fraternité, la comparant à un monde sous un soleil brillant ou un beau jardin de fleurs odorantes et variées, ajoutant : « C'est ce qui nous transcende qui nous rassemble ». Il indiqua ensuite comment le terrorisme pouvait susciter la peur et l'intolérance, même chez des personnes religieuses et dévouées, en contradiction avec leur propre foi, et comment il luttait pour maintenir des liens de fraternité avec les plus isolés.
Jacques Marion, président de la FPU-France, donna ensuite un bref rapport sur la récente inauguration de l'Association internationale des parlementaires pour la paix à Londres. Puis il parla du rôle de conscience que devraient prendre les responsables religieux afin d’aider les sociétés à bâtir « une famille en Dieu » au-delà des frontières. Il y a trois points, dit-il, sur lesquels les religions devraient se concentrer afin d'atteindre cet objectif : promouvoir une culture du cœur et de l'altruisme ; enseigner les principes de la vie familiale ; et clarifier la réalité du monde spirituel et la relation de cause à effet entre vie sur terre et vie après la mort.
Après un débat avec le public, le modérateur présenta Mme Patricia Earle, présidente de la Fédération des femmes pour la paix mondiale à Birmingham, au Royaume-Uni, qui était venue à Paris dans la journée pour donner son témoignage à la réunion. Après vingt ans de sensibilisation, à partir de chez elle, auprès de femmes de toutes religions et cultures dans la métropole multiculturelle de Birmingham, Mme Earle et un groupe de femmes ont bâti une communauté interconfessionnelle et interculturelle dynamique, organisant régulièrement des rencontres et des dialogues, développant des programmes de formation de la personnalité, soutenant un orphelinat en Inde qu’elles ont créé. Leurs efforts ont été récompensés par la ville, où on les appelle à témoigner en exemple. Le témoignage de Patricia toucha le cœur de chaque participant. Elle n'avait ni assez de mots ni assez de temps pour décrire toutes ses activités, mais elle transmit son cœur et son dévouement, attirant le respect de chacun.
La deuxième session était animée par Mme Brigitte Wada, présidente de la FFPM en France.
Le premier orateur fut le Cheikh Abdelkader Achour, imam de la mosquée Omar du 11e arrondissement de Paris. Le Cheikh Achour parla de l'islam et de la fraternité, se référant au Coran et aux expériences de la vie du prophète Mahomet. Évitant judicieusement d'aborder des questions politiques, il attira l'attention sur les fondamentaux de l'islam, en particulier sur l'attitude et les réactions pacifiques du Prophète face à la persécution. Répondant aux questions de l'auditoire, il souligna le fait que tuer au nom de l'Islam, y compris dans les cas récents d’agressions contre la communauté Ahmadiyya, relevait du même esprit qui suscitait l'attaque de nombreux sites et croyants musulmans autour du monde et ne reflétait ni le cœur ni l'enseignement du Prophète.
La deuxième partie de la session était consacrée aux perspectives des jeunes sur la fraternité en ces temps de troubles. Elle fut introduite par deux chansons sur l'amour et la miséricorde de Dieu chantées par un jeune couple, Nicolas et Gaelle Tacher-Metifeu. Puis Alexandre Huard, membre exécutif de la FPU, donna quelques réflexions sur la vision du fondateur concernant le développement du cœur, de l'enfant au frère ou à la soeur, puis au mari ou à la femme, et enfin au parent. Jeune père lui-même, en attente d'un deuxième enfant, il parla de son expérience de vie personnelle quant à l'éducation du cœur, base de la fraternité.
Deux jeunes couples et un jeune chrétien syrien ayant participé aux Journées mondiales de la jeunesse 2016 à Cracovie avec le pape François (au moment où le père Hamel était tué en Normandie), conclurent la journée en partageant leur expérience aux côtés de millions de jeunes du monde entier. Nicolas et Gaëlle, qui n’en étaient pas à leurs premières JMJ, louèrent l'hospitalité des Polonais et le fait que des jeunes de toutes les religions avaient été invités cette fois-ci. Gaëlle en profita pour demander à l'Imam Achour si on pouvait organiser un événement similaire, même à petite échelle, avec des jeunes chrétiens et musulmans en France.
Sun Ming et Sophie Barje-Barrios exprimèrent leur étonnement qu’ils aient pu ressentir tant de fraternité et de confiance avec des millions de jeunes inconnus, partageant avec eux des conditions de vie difficiles, mais aussi des valeurs semblables. En particulier, Sophie nota l'esprit dynamique des jeunes catholiques de France qu’elle avait rencontrés, remarquant que le catholicisme n'était en fait pas sur le déclin comme on le dit souvent.
Le dernier orateur, un jeune chrétien syrien nommé Sharbel Al Hosh, venu en Europe comme réfugié il y a seulement un an et demi, exprima toute la gratitude qu’il ressentait envers l'esprit de communion qu'il avait expérimenté aux JMJ. Puis, du fond de son cœur qu’on sentait meurtri, il demanda aux participants de ne pas se laisser influencer par les rapports des politiciens sur le conflit au Moyen-Orient, et de chercher à comprendre le cœur des habitants qui luttent pour la paix.
A la fin du programme, les participants dirent qu'ils avaient senti un esprit bienveillant embrasser la réunion.
* Le Forum du 17 septembre était le deuxième d'une série de trois programmes prévus à Paris en 2016 pour discuter des questions sociales contemporaines à travers le prisme de la famille. Puisant dans la richesse de leur tradition fondatrice sur les questions touchant à la famille, les responsables religieux sont appelés à inspirer les jeunes à hériter de cette sagesse et bâtir un monde de paix au-delà des barrières nationales, politiques et religieuses du passé. Un premier forum le 14 mai avait abordé la relation parent-enfant et la question de l'héritage ; après celui du 17 septembre sur la fraternité dans une société multiculturelle, le troisième forum abordera la question de l'amour conjugal et de l'égalité des sexes. Ces discussions seront ensuite développées dans d’autres programmes au cours des années qui viennent.